mordre
étymologie
Du latin populaire mŏrdĕre, en latin classique mŏrdēre « mordre ». De cette racine latine, le français a aussi mordicus.

verbe

mordre \mɔʁdʁ\ transitif conjugaison

  1. Serrer avec les dents de manière à entamer.
    • Catherine et moi nous allions derrière, dans le verger ; nous mordions dans les mêmes pommes et dans les mêmes poires ; nous étions les plus heureux du monde. (Erckmann-Chatrian, Histoire d’un conscrit de 1813, J. Hetzel, 1864)
    • Il trempait son pain dans sa soupe et il en mordait d’énormes bouchées, […]. (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 246 de l’éd. de 1921)
    • Mords-moi... Je veux que tu me mordes... Là, dans le cou, sous les cheveux, comme les chats font aux chattes... (Pierre Louÿs, Trois filles de leur mère, René Bonnel, Paris, 1926, chapitre I)
    • (Absolument)Si l’animal a le vice de mordre, il est attaché très-court, […]. (Gabriel Maury, Des ruses employées dans le commerce des solipèdes, Jules Pailhès, 1877)
  2. (Par extension) Piquer avec le bec ou un dard.
    • Le perroquet mord.
    • Cet enfant est tout mordu de puces.
  3. (Par analogie) (architecture) Enserrer fermement.
    • Des moises doubles J pinçaient ce poteau D, reposaient sur la longrine F, mordaient les trois poteaux G, H, I, celui G étant appuyé sur le parement incliné du merlon, et venaient saisir le poteau postérieur K également incliné. (Eugène Viollet-le-Duc, La Cité de Carcassonne, 1888)
  4. (familier) Prendre du goût pour une étude, y faire des progrès.
    • Cet enfant commence à mordre au latin.
    • Du reste, je n’étais pas le seul de mon avis sur la poésie hindoue. J’avais mon voisin de gauche qui n’y mordait pas non plus… (Alphonse Daudet, Le petit Chose, 1868, réédition Le Livre de Poche, page 181)
    • Tandis que la plupart de mes condisciples, affaiblis par l’humanisme un peu fade de M. Dupanloup, ne pouvaient mordre à la scolastique, je me pris tout d’abord d’un goût singulier pour cette écorce amère ; je m’y passionnai comme un ouistiti sur sa noix. (Ernest Renan, Souvenirs d’enfance et de jeunesse, 1883, collection Folio, page 128)
  5. (Figuré) Ronger, creuser ou percer.
    • Nous atteignons bientôt la région des nuages, et la température tombe si bas, que le froid nous mord horriblement les mains et les pieds. (Jules Leclercq, La Terre de glace, Féroë, Islande, les geysers, le mont Hékla, Paris : E. Plon & Cie, 1883, page 82)
    • Le grand air de l’Océan mordait notre visage avec une violence telle que nous avons dû, à plusieurs reprises, étaler sur les joues et le nez de la vaseline, dont nous nous étions munis. (Dieudonné Costes & Maurice Bellonte, Paris-New-York, 1930)
    • Un fumet âcre, une odeur de fraîchin, comme disent nos matelots lorsqu'ils veulent qualifier cette odeur que les grands poissons de mer laissent après eux, me mordait à la gorge, […]. (Alexandre Dumas, Les baleiniers: voyages aux terres antipodiques : Journal du Docteur Maynard, tome 1, Paris : chez Calmann-Lévy, s.d. (1861 ?), page 298)
    • L’eau-forte mord sur les métaux.
    • L’eau-forte n’a pas assez mordu sur cette planche.
    • La lime ne mord point dans l’acier bien trempé.
    • L’ancre n’a pu mordre sur ce fond de rocher.
    • Cette vis n’a pas mordu dans le bois : elle n’a pas pénétré dans le bois.
    • Les dents de cette roue ne mordent pas assez sur le pignon : elles n’engrènent pas assez.
  6. (Pêche) Saisir l’appât.
    • Le poisson mord, ne mord pas.
    • C’est l’heure, où les poissons mordent parfois à l’hameçon.
    • Elle sourit en me voyant : elle m’avait reconnu. Peut-être son sourire signifiait-il aussi : « Le poisson mord !… » Mais je m’efforçai de chasser cette pensée. (Paul Guth, Le mariage du Naïf, 1957, réédition Le Livre de Poche, page 53)
    • Ça mord bien aujourd'hui.
  7. (gravure) Faire subir l’action de l’eau-forte, après avoir découvert en différents endroits, à l’aide d’une pointe à graver, le vernis dont elle est enduite.
    • Mordre une planche, ou Faire mordre une planche.
  8. (typographie) Dépasser, déborder.
    • La vignette mord sur les lettres : elle avance sur les lettres.
    • Il faut mordre plus avant dans l’étoffe : il faut faire la couture un peu plus loin du bord de l’étoffe, pour qu’elle ne se défasse pas.
  9. Border, comme en empiétant.
    • Le Sahara de sable jaune mord sur une mer bleue comme un trottoir interminable. (Antoine de Saint-Exupéry, Courrier Sud, 1929, III, 6.)
  10. (Figuré) Médire, reprendre, critiquer, censurer avec âpreté.
    • Il cherche à mordre sur tout.
    • Il n’y a point à mordre sur sa conduite.
    • Il ne donne point à mordre sur lui.
  11. (argot) (vieilli) Regarder.
    • De n’pas danser, on mord les autres, n’est-ce pas ? et j’ai justement vu — quand tu m’interrogeais — une connaissance avec qui j’suis en affaire et qui, en douce, m’a fait signe de rappliquer. (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928)
    • Le Bosphore, eh bien le Bosphore c’est pas de la merde non plus ! Tiens, matez les couleurs : la Corne d’Or, la Mer Noire, la Mosquée Bleue et les minarets, mordez les minarets ! (Bernard Blier, Le cri du cormoran le soir au-dessus des jonques, Michel Audiard, 1971)
synonymes
serrer avec les dents de manière à entamer

traductions
traductions
  • russe : кусать, жалить

traductions
  • allemand : beißen
  • russe : клевать



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